Là où les chiens aboient par la queue
Un roman familial touchant

Estelle-Sarah Bulle avec pose avec son roman
A 16 ans Antoine quitte son village, Morne-Galant, ce trou perdu ou elle est née, a vu naitre son frère et sa sœur et mourir sa mère. Elle s’en va pour se trouver et trouver un chemin de vie plus confortable. Un parapluie rouge, une robe blanche et un vieux mouchoir pour tout bagage mais elle est surtout armée d’un caractère bien trempé.
Nous sommes dans les années 1940 et Pointe-à-Pitre n’est pas la grande ville d’aujourd’hui. Des quartiers modestes, de la boue, des taudis fait de bois et de tôles, l’insalubrité prégnante, pourtant elle impressionne Antoine qui n’y est venue qu’une fois ou deux et qui envie la vie des citadins.
L’ouvrage nous racontera également le destin de tante Lucinde la couturière émérite qui deviendra une adresse populaire pour toutes les belles séduites par la mode, et du petit frère Hilaire qui préférera se fondre dans le paysage des bumidomiens de Créteil.
Grace à l’accueil de sa cousine la bien mariée, aidée par sa beauté et sauvée grâce à ses dons pour le commerce, Antoine prospère et gagne son indépendance.
Estelle-Sarah Bulle traverse le temps et les océans avec des mots qui chantent la Guadeloupe. Entre le créole et le français on y trouve son compte et on vogue à travers les destinées de ces trois personnages que l’on a envie de croire tout prés de nous.
Toutefois c’est surtout Antoine qui joue les héroïnes dans l’ouvrage où Sarah-Bulle choisi une petite nièce pour raconter l’épopée familiale et comprendre les comportements de ces déracinés à la peau délavée par les rigoureux hivers. Car ils quitteront tous un jour la Guadeloupe pour essayer de se construire un devenir plus doux dans l’hexagone.
En effet, après quelques trafics et beaucoup de rêves brisés, Antoine se retrouvera dans la froide capitale. Cependant c’est entourée des siens et en conservant son mysticisme jusqu’auboutiste qu’Antoine tirera sa révérence.
Ne passez pas à cotés de ce chef-d’œuvre touchant et distrayant. L’auteur qui signe ici son premier roman mélange avec brio l’exotisme de notre Guadeloupe, la nostalgie et j’ose dire l’histoire. Elle dit la peine, le chagrin, les remords, les rancœurs, le déracinement, mais elle dit également la beauté, le métissage, le pardon, la famille. Elle semble avoir tiré les verres du nez de cette fratrie abimée par la misère, le défaut de tendresse parentale, le dur combat de la vie et l’expatriation des antillais coincés entre deux mondes si différents.
Estelle-Sarah Bulle dresse un portrait somme toute assez réaliste du vécu de certaines de nos familles antillaises. Romanesque, vive, une écriture fine, c’est une vraie conteuse.
yé krik yé crac
Commentaires récents