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Passé composé – Mémoires d’Anne Sinclair

En juin dernier, il y a tout juste 2 mois, Anne Sinclair publiait Passé composé, ses mémoires.

D’aucun diront qu’elle ne dit pas grand-chose dans ce livre, qu’elle ne se positionne pas, ou qu’il manque un peu de profondeur à son récit.

Ce n’est pas mon point de vue.

C’est vrai qu’aujourd’hui bien des vies privées sont également publiques. Les médias actuels le permettent et l’on peut s’y adonner facilement, même sans s’en rendre compte.

Pour ma part je respecte ceux et celles qui parviennent, tout en communiquant, à faire la part des choses. Au nom de quoi devrions-nous tout dire ?

Dans cet ouvrage Anne Sinclair aborde des sujets intéressants comme celui de ses origines, l’attachement particulier qui la liait à son père, ainsi que les relations difficiles d’sa mère. L’affaire DSK ou l’affaire du Sofitel de New-York y est aussi évoquée : « ce séisme qui a dévasté ma vie » selon propres ses mots.

Une part importante du livre est centrée sur les portraits de personnalités qu’Anne Sinclair a invitées à son émission emblématique 7/7, tous les dimanches, et ce, durant 13 longues années. Pour ceux de ma génération et les plus murs, à ce moment du récit, les souvenirs remontent à la surface avec un peu de nostalgie. On revoit les pulls en mohairs de la journaliste, la coiffure figée, le regard bleue et on se souvient de sa pugnacité.

J’ai le sentiment que la ou certain voit des cachoteries, du secret, il y a en réalité la véritable personnalité en délicatesse et en pudeur de cette grande professionnelle. Elle y confie une nature « fondamentalement craintive, pusillanime et timorée », « sensible à l’extrême, mélancolique souvent, angoissée fréquemment ».

Madame Sinclair confesse aussi vivre dans l’aisance grâce à l’héritage familial et à ses émoluments de journaliste médiatique.

Au fur et à mesure de la lecture on découvre une femme qui n’a pas peur de d’égratigner, de fêler l’image que l’on pourrait avoir de sa personne. Sans être malveillante elle est sans concession avec elle-même. Elle ne force pas le trait mais le trace tout de même en touchant du doigt ses faiblesses. « J’ai été absente pour mes enfants, je n’ai pas vu toutes les faces de l’homme avec lequel j’ai partagé ma vie durant 20 ans, etc…Je n’ai pas vu, … j’ai été licenciée comme une moins que rien, etc … ».  Anne dit les choses avec sa vérité, avec une certaine franchise mais avec élégance.

Les mots sont forts pour évoquer ce qui n’appartient pas à la presse de caniveau, au voyeurisme… mais à l’histoire de notre pays.

Dès les premières lignes le ton doux et vrai est accrocheur. Dans notre tête, raisonne la voix bien connue de cette journaliste discrète. Les mots sont précis, le langage est soutenu, les chapitres se déroulent selon en procédé classique et agréable.

Les lignes défilent vite car on a envie de rester auprès d’elle, dans un salon, un bureau, que l’on imagine cossu, agréable, face à une fenêtre qui donnerait sur un magnifique magnolia. On s’installe à notre tour dans un confortable fauteuil et on partage ce qu’Anne Sinclair nous offre généreusement.

J’ai aimé cet ouvrage et je le recommande.

Pour autant, je n’ai jamais été une fan d’Anne Sinclair, et je ne le suis pas devenue en lisant Passe composé. Je concède tout de même qu’elle m’apparait désormais plus sympathique ou moins rigide, c’est certain. J’oserai peut-être dire fragile.

Nonobstant cela, pour ceux qui aiment la culture, les amoureux des livres bien écrits, les curieux de la vie, ce livre est agréable et instructif.

Il est doux.